La situation exceptionnelle vécue dans les derniers mois a créé de nombreux enjeux et des tonnes de questions chez les employeurs qui doivent faire preuve de flexibilité et d’agilité, tout en naviguant dans l’incertitude quant au futur, même à court terme, considérant les directives et recommandations du gouvernement et des autorités sanitaires qui évoluent constamment en fonction de l’évolution du virus et de ces variants.
Les décisions et mesures mises en place aujourd’hui seront possiblement désuètes le mois prochain. Cela ne veut toutefois pas dire qu’il ne faut rien faire en attendant que cela passe, puisque personne ne sait quand nous pourrons enfin dire que tout cela est derrière nous.
Dans ce contexte, quelle position peut adopter un employeur sur la question de l’heure : la vaccination contre la Covid-19?
Nous vous proposons quelques pistes de réflexion à ce sujet.
Un employeur peut-il exiger la vaccination de ses employés?
Tout d’abord, on doit se rappeler qu’en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, l’employeur a l’obligation d’assurer la santé et la sécurité de ses employés. D’autre part, en vertu du Code civil du Québec, toute personne a le droit de consentir de façon libre et éclairée à ses soins de santé, et la Charte des droits et libertés de la personne protège les droits à l’intégrité physique et aux libertés de la personne.
L’exigence de la vaccination en milieu de travail est susceptible de porter atteinte à ces droits, et c’est pourquoi l’obligation vaccinale ne devrait pas être imposée par un employeur, sauf si cela constitue une exigence professionnelle justifiée. C’est-à-dire qu’après étude et analyse des risques propres à un milieu de travail et plus spécifiquement à un titre d’emploi dans l’entreprise, s’il apparaît clair pour l’employeur qu’il s’agit d’une mesure qui justifie la raisonnabilité de l’entorse faite aux droits et libertés protégés par la Charte, il pourrait décider de le faire.
Pour tous les autres milieux de travail qui ne présentent pas de risque justifiant une telle intervention de l’employeur, les recommandations des autorités de Santé publique et de la CNESST devraient être mises en place et renforcées auprès des employés. En effet, pour l’instant le gouvernement a choisi de ne pas imposer la vaccination obligatoire en milieu de travail, considérant que les mesures de protection recommandées sont suffisantes pour assurer la santé et la sécurité dans la plupart des milieux de travail. Ces recommandations sont à l’effet d’encourager le télétravail lorsque c’est possible, de maintenir une distance en tout temps sur les lieux de travail, de porter le masque dans les lieux communs ou en tout temps lorsque la distanciation n’est pas possible, de se laver les mains fréquemment, de respecter l’étiquette respiratoire, de surveiller l’apparition de symptômes chez les employés, etc.
Il est important de mentionner qu’il n’y a pas encore eu de décision des tribunaux suite à une contestation dans le présent contexte pandémique. Toutefois, tout semble indiquer que compte tenu de la situation épidémiologique planétaire, les tribunaux seront sensibles aux arguments des employeurs, mais seule la jurisprudence à venir nous le confirmera. D’ici là, la prudence est de mise.
Ceci étant dit, plutôt que de parler d’imposition de la vaccination, un employeur pourrait mettre en place certaines mesures à l’endroit des employés qui décident de ne pas se faire vacciner, par exemple, restreindre leur accès au lieu de travail en leur proposant plutôt le télétravail, lorsque cela est possible. Ce faisant, même si on parle d’une certaine « discrimination », l’employeur propose une alternative acceptable et cela contribue à rassurer les autres employés qui sont sur les lieux de travail.
Évidemment, la situation doit être adressée différemment si l’employé ne peut se faire vacciner pour des motifs religieux ou de santé. Dans ce cas, après l’obtention d’une pièce justificative, l’employeur devra appliquer une mesure d’accommodement acceptable pour l’employé en question.
Un employeur peut-il demander le statut vaccinal de ses employés?
Il est possible de le demander, mais un employé pourrait refuser de consentir et il serait dans son droit de le faire. Pour un employeur qui décide d’aller de l’avant, il est conseillé d’en faire la demande par écrit, en indiquant de quelle façon cette information sera conservée afin d’en assurer la confidentialité et de demander la signature de l’employé pour confirmer son consentement.
Le statut vaccinal d’un employé ne peut être utilisé à des fins de discrimination, de congédiement ou d’embauche. L’accès à cette information doit être restreint et doit être géré en conformité avec les principes en matière de collecte de renseignements personnels et confidentiels.
Un employeur peut-il adopter une politique de vaccination?
Il est recommandé d’adopter une politique indiquant les attentes et les exigences de l’employeur quant à la vaccination en milieu de travail, afin qu’elles soient connues et claires pour tous. Cela viendra confirmer que les employés sont libres de recevoir la vaccination et de fournir à l’employeur une preuve vaccinale ou non, mais que ces refus pourraient justifier l’imposition de mesures administratives.
L’adoption d’une telle politique est une bonne occasion pour l’employeur de renforcer son engagement envers son obligation d’assurer la santé et la sécurité de ses employés et de rappeler l’importance du respect des mesures de protection mises en place, dans le contexte actuel.
Dans tous les cas, la politique adoptée doit être raisonnable et sa mise en application doit être systématique.
En conclusion, peu importe si l’employeur décide d’imposer la vaccination ou non, il serait important d’avoir au moins une réflexion à ce sujet et de se positionner clairement, de façon cohérente et de le communiquer à l’ensemble des employés.
Cette réflexion nécessaire devrait aussi porter sur ce qui devra être mis en place à court, moyen et long terme afin de continuer à faire face à cette situation inhabituelle qui est en train de modifier le monde du travail de façon durable. Dans le feu de l’action, il peut être difficile de se projeter dans l’avenir, mais l’exercice en vaut la peine.
Avis de non-responsabilité : Il ne s’agit pas ici d’une opinion juridique, mais d’un document à titre informatif seulement, en fonction des informations disponibles aujourd’hui. Les conseils d’un avocat en droit du travail sont requis afin de connaître les implications légales associées à votre entreprise.
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